Home > Culture étoffe L’Alcantara®, une copie conforme En ces temps si particuliers, le confinement à ceci de positif, c’est que nous nous occupons probablement plus qu’à l’habitude de notre logis. Nous y passons beaucoup plus de temps et ces heures peuvent être mises à profit pour repenser, voire repanser, l’esthétique de notre intérieur. Changement de saison, changement de décor : objets revisités, nouvelles peintures murales, optimisation de l’espace Mais, de toutes ces belles idées, la transformation côté étoffe peut aisément modifier votre environnement en ajoutant une touche émotionnelle. Le temps du déconfinement venu, votre choix sera fixé, les plans seront fin prêts pour ouvrir le bal et sabrer le champagne.Ce mois-ci, je vous entraîne sur le chemin pavé de douceur, d’élégance et de sophistication de l’Alcantara®. UN DROLE DE NOM POUR UNE DROLE D’ETOFFE Alcantara®, de Al quantar ou El kantara en arabe, qui signifie pont parce que, non loin de l’embouchure d’un fleuve sicilien baptisé Alcantara, un pont fut construit par les sarrasins en gros quartiers de pierres de lave, qui joint ses deux rives avec, en toile de fond, le superbe et capricieux Etna : CQFD ! Tissus Alcantara® UN MOT ET PLUSIEURS VIES Alcantara est le nom d’une entreprise italienne qui fabrique une étoffe baptisée Alcantara® ; c’est aussi devenu une marque déposée. UN- DEUX –TROIS PETITS TOURS UN : cet ovni est né au Japon. DEUX : il fut commercialisé aux USA dans les années 70 sous la dénomination « new suede ». TROIS : il a finalement trouvé son point d’attache en Italie. « UN PONT » ENTRE L‘ASIE ET L’EUROPE Afin de conquérir le marché européen, surtout celui de la Haute-Couture, les japonais passèrent un accord avec Iganto, une société italienne installée dans la région de Milan. Désormais, cet article est produit en Europe. MERCHANDISING-MERCHANDISING L’idée de proposer un produit fabriqué industriellement imitant les cuirs suédés, extrêmement fins et souples et jadis utilisés pour la ganterie n’est pas nouvelle. L’industrie textile lança dans les années 30, la suédine, une étoffe imitant ces cuirs. En 1950, le catalogue de la Redoute proposait à ses abonnées des vêtements en suédine. Dans les années 70/80, c’était une matière familière, un peu raide, parfois cartonneuse mais les vestes, les gilets ou les sacs, furent adoptés par la génération du baby boom et connurent un joli succès. Les japonais suivirent cette idée et, à l’aide des techniques modernes, furent les premiers à fabriquer des microfibres. Pour vous donner une idée plus précise de l’ordre de grandeur des microfibres imaginez que des milliers de mètres ne pèsent pas plus d’un gramme. Partant de là, l’Alcantara® fut mis au point et proposé comme une suédine de luxe, plus souple, plus solide, avec un aspect plus proche des cuirs suédés. Tissu Alcantara Master – Alcantara UN VRAI FAUX Après cette mise au point sur sa composition, centrons maintenant notre regard sur cet intrus dans l’univers textile. Hier, c’est-à-dire dans le monde d’avant, on pouvait se dire que remplacer une véritable peau de bête par une copie presque identique c’était une question d’économie. Aujourd’hui, on se dit que c’est végan à défaut d’être bio et que c’est bon pour le bien être animal. Fourrure, peau, cuir, soie naturelle, tout cela n’est plus d’actualité, on parle de simili cuir, simili fourrure…Simili ? Certes ce mot est obsolète, mais je trouve qu’il a sa place dans cet article : simili placé devant un nom, désigne l’imitation de la chose mentionnée. Bien sûr il y a simili et simili…Alors parlons franc ; oui, l’Alcantara® est une petite merveille, la plus parfaite des imitations du cuir suédé. Certes il demeure un produit de luxe, mais le prix élevé me semble parfaitement justifié. LA RECETTE L’Alcantara résulte d’un mélange d’une microfibre polyester, amalgamée avec du polyuréthanne : 60% polyester et 40% polyuréthanne. Ce produit est composé d’une couche uniforme de fibres extrêmement fines coupées en minuscules segments dont la disposition se rapproche de la structure microscopique de la peau du daim naturel. L’Alcantara n’est pas un tissu puisqu’il n’est pas tissé mais une étoffe qui possède l’apparence du daim, il laisse sous les doigts les mêmes traces caractéristiques. L’aspect est identique sur les deux faces. Son toucher est moelleux, velouté, type peau de pêche. LE DAIM DANS L’IMAGINAIRE COLLECTIF Si, jadis, la peau du daim fut utilisée, aujourd’hui, c’est un animal protégé et le daim, en 2020, n’est qu’une peau généralement de vache ou de porc qui subit un tannage spécifique sur la partie envers donnant ainsi un cuir suédé, souple et doux. Si les mots ont encore un sens, il serait plus judicieux d’employer le terme cuir-velours car du daim des chaussures ou des vestes, il ne reste que le souvenir. SOUVENT IMITE, RAREMENT EGALE On peut dire que le mot Alcantara est un antonomase au même titre que Frigidaire® ou Skai® ; des noms propres de marques devenus noms communs. Le succès attire les imitateurs et les copies ne tardèrent pas à faire leur entrée sur le marché. Des concurrents qui parfois acceptent le challenge et officiellement proposent des imitations de l’Alcantara comme le tissu Alicante. Souvent et subtilement, le consommateur est induit en erreur ne voyant que le nom d’Alcantara dans l’argumentaire du vendeur. Afin d’éviter ce problème, la société Alcantara fournit un certificat d’authenticité avec ses articles. Tissu Alcantara Toile – Alcantara DES IMITATIONS D’IMITATION Surfer sur le succès commercial de l’Alcantara® s’est avéré intéressant. A condition d’avoir eu en main le véritable Alcantara, il est aisé de distinguer le vrai faux du faux faux. L’Alcantara® est souple, au toucher proche du velours, les deux faces sont identiques : même couleur, même texture. Tout vêtement en Alcantara® porte une étiquette Alcantara et un numéro brodé en lettres dorées sur le tissu, afin de garantir son authenticité et, lorsqu’il s’agit d’étoffe au mètre, la lisière parlante ne laisse aucun doute. Les imitations s’éloignent du modèle original. Les techniques de fabrication sont moins sophistiqués d’où une solidité plus faible, une gamme de couleurs restreinte, mais un coût de production inférieur à celui de l’Alcantara® qui permet d’être plus attractif commercialement. Elles sont plus souples, plus légères, en coton, ou bien, elles sont très raides et lourdes et dans les deux cas, les deux faces sont différentes. UN AVENIR PLUS QUE PROMETTEUR Il existe deux qualités : une qualité légère, poids chemise ou robe, et une plus épaisse et plus lourde poids manteau ou veste, et parfaitement adaptée à l’ameublement. Par rapport à la peau véritable, cette étoffe possède des atouts non négligeables : c’est un produit qui se détache aisément. Il est proposé dans une grande variété de coloris, se travaille aisément et sa largeur constante évite les pertes qui se produisent lorsqu’on travaille avec des peaux d’animaux qui n’ont pas de formes régulières. Il possède une stabilité dimensionnelle impressionnante au lavage (il est fortement conseiller d’utiliser des doublures et des fils ayant les mêmes caractéristiques). Son entretien est aisé « Wash and wear » : lavage facile à 30° sans repassage. Sa faible densité en fait un matériau léger contrairement aux peaux véritables. Je dirais que son seul handicap est son prix mais, en tenant compte de la technicité de ce produit et sachant que son prix de revient est à peine inférieur à celui d’un beau cuir, ce produit de luxe « le vaut bien ». DES UTILISATIONS AU QUOTIDIEN Moins étonnant mais aussi importante, la demande est croissante dans le domaine de la décoration d’intérieur. Depuis plus de 30 ans, la maison Lelièvre est le distributeur officiel en France. En revêtement mural c’est un luxe, mais le résultat est magnifique. Je suis une inconditionnelle de cette matière. Mon expérience en tant que consommatrice est des plus positives : il y a bien des années, j’avais tendu sur les murs d’une petite pièce bureau un Alcantara® vert pâle et j’ai vraiment aimé cette idée, cocooning à souhait, facile à tendre car il ne se déforme pas, les couleurs restent aussi délicates après plusieurs années. Forte de ce constat, j’avais recouvert mes chaises de salle à manger d’un Alcantara marron glacé, et ces assises ont vaillamment résisté aux taches et aux assauts de mes enfants. C’est désormais un article devenu indispensable pour l’industrie automobile. Les marques les plus prestigieuses utilisent cette étoffe pour recouvrir les sièges de leurs véhicules, à la place du cuir. Siège automobile en Alcantara® Et si ce post vous a convaincu, il ne vous reste plus qu’à feuilleter le catalogue d’Etoffe.com. Catherine GOLDMAN Facebook Linkedin Instagram Pinterest Ecrire, c’est un peu tisser : les lettres, en un certain ordre assemblées, forment des mots qui mis bout à bout, deviennent des textes. Les brins de fibres textiles maintenus ensemble par torsion forment des fils qui, en un certain ordre entrelacés, deviennent des tissus…Textile et texte, un tête à tête où toute ressemblance n’est pas fortuite. Il est des civilisations qui transmettent leur culture par l’écriture, d’autres par la parole, d’autres encore, par la parole écrite avec un fil. Entre le tissu et moi, c’est une histoire de famille. Quatre générations et quatre manières différentes de tisser des liens intergénérationnels entre les étoffes et les « textilophiles ». Après ma formation à l’Ecole du Louvre et un passage dans les musées nationaux, j’ai découvert les coulisses des étoffes. Avec délice, je me suis glissée dans des flots de taffetas, avec patience j’ai gravi des montagnes de mousseline, avec curiosité j’ai enjambé des rivières de tweed, pendant plus de 35 ans, au sein de la société De gilles Tissus et toujours avec la même émotion. J’eus l’occasion d’admirer le savoir-faire des costumiers qui habillent, déguisent, costument, travestissent les comédiens, acteurs, danseurs, clowns, chanteurs, pour le plus grand plaisir des spectateurs. J’ai aimé travailler avec les décorateurs d’intérieurs toujours à la recherche du Graal pour leurs clients. Du lange au linceul, le tissu nous accompagne, il partage nos jours et nos nuits. Et pourtant, il reste un inconnu ! Parler chiffon peut parfois sembler futile, mais au-delà des mots, tissu, textile, étoffe, dentelle, feutre, tapisserie ou encore broderie, il est un univers qui gagne à être connu. Ainsi, au fil des ans les étoffes sont devenues des amies que j’ai plaisir à vous présenter chaque mois sur ce blog de manière pédagogique et ludique. Je vous souhaite une belle lecture. Related Posts Culture étoffe Fornasetti : l’artiste aux mille visages Culture étoffe Expo : à découvrir dès maintenant ! Culture étoffe Le Lampas, une étoffe d’exception Culture étoffe « Léviathan » d’Anish Kapoor au Grand Palais : une oeuvre gonflée ! Culture étoffe Le Taffetas, une étoffe qui éveille nos sens Culture étoffe Kabuki, les costumes du théâtre japonais. 2 Responses Comments 2 Pingbacks 0 J’ai pu trouver dans l’article de nombreux renseignements que je cherchais. Un grand merci. Bonjour Étant artisans nous-même, nous apprécions la qualité de votre article et votre passion des « beaux tissus ». Pour parler de l’Alcantara, déjà très beau il existe un tissu issu des mêmes technologies, peut utiliser de nos jours dans le monde de l’automobile et encore plus beau et plus luxueux, l’Amaretta . Au plaisir de vous lire Laisser un commentaireVotre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *Commentaire * Nom * E-mail * Site web Post commentΔ Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées. Prev Post La Moire, un parcours hors normes Next Post L’Écossais, un motif universel
Bonjour Étant artisans nous-même, nous apprécions la qualité de votre article et votre passion des « beaux tissus ». Pour parler de l’Alcantara, déjà très beau il existe un tissu issu des mêmes technologies, peut utiliser de nos jours dans le monde de l’automobile et encore plus beau et plus luxueux, l’Amaretta . Au plaisir de vous lire